Ces différentes propositions sont à réaliser en début de séance afin que le visage soit mis dans de bonnes conditions pour effectuer ensuite le travail musculaire. Elles peuvent être reprises quotidiennement au domicile, après avoir été bien expliquées au patient.
Cette étape ne doit pas durer plus de quelques minutes (10 minutes maximum).
Objectifs :
- Détendre le côté paralysé pour aider à la récupération nerveuse (amélioration de la circulation nerveuse, aiguillage et assouplissement des fibres).
- Détendre l’hémiface saine afin d’éviter le développement du hyperactivité par surinvestissement.
- Prévenir les contractures qui font partie des risques et complications dans l’évolution.
- Faire prendre conscience au patient de l’état de tension et de celui de détente afin de les différencier.
La thermothérapie
La motricité faciale contribue à la circulation et la paralysie peut de ce fait provoquer une stase sur la zone touchée avec un appauvrissement des échanges nutritionnels (Hebting et Ferrand, 2015).
L’utilisation de chaleur avant les massages est décrite comme bénéfique : elle permet en effet de pallier cette stase en générant une hypervascularisation qui favorise les échanges métabolique dans le muscle. Elle augmente ainsi la vitesse de conduction nerveuse et favorise la contraction à condition que la repousse nerveuse soit active. Elle génère aussi une sédation.
Elle est encore plus particulièrement recommandée en hiver, lorsque le patient arrive en séance après une exposition au froid, qui “cartonne” les muscles.
Le principe est d’appliquer sur une partie du visage un objet émettant de la chaleur sans pour autant brûler le patient (attention donc à contrôler la température) pendant 10 minutes.
On peut utiliser différents matériels sous forme de compresses chaudes qui englobent toute l’hémiface :
- Chaufferettes pour main, coussins thermo-chauffants ou petite bouillotte éventuellement entourés d’une protection tissulaire ou d’un sopalin pour éviter les brûlures
- Sac de graines de lin (30 secondes au micro-ondes)
Hebting et Ferrand (kinésithérapeutes) mentionnent d’éventuelles compresses chaudes intra-buccales au niveau de la face interne des joues si besoin.
La vibrothérapie
La vibrothérapie consiste à recourir à un appareil de vibration, ce qui signifie utiliser des ultrasons. L’énergie issue des vibrations à basses fréquences est absorbée par les tissus, ce qui permet de détendre les contractures musculaires.
Elle est surtout utilisée dans les formes hypertoniques sur des zones hypercontractées pour un effet décontractant.
Contre-indications :
- Stimulateur cardiaque, valve cardiaque artificielle, palpitations cardiaques
- Epilepsies
- Grossesse
- Articulations artificielles avec vis de fixation
- Inflammation de la peau, eczéma
- Fracture, implant, plaie ouverte
- Pas d’application directe sur les yeux, la glande thyroïdienne, le larynx
Les stimulations manuelles
Attention :
L’apprentissage des massages nécessite d’être formé afin de savoir comment ajuster la pression et développer une maîtrise du toucher thérapeutique. Une prise en soin conjointe orthophoniste/kinésithérapeute apparaît idéale mais ce partenariat n’est pas toujours évident en pratique. Certains aspects pouvant différer selon la prise en charge et les professionnels, nous avons essayé de présenter les principes de base sans prétendre enseigner comment réaliser ces massages.
Les massages sont généralement très douloureux au départ au point de susciter des larmes mais la douleur s’amenuise au fur et mesure grâce à la répétition régulière du processus. La thermothérapie est souvent utilisée en amont afin de détendre les muscles.
Le patient doit dans tous les cas apprendre à les réaliser lui-même quotidiennement, pendant 10 à 15 minutes. La douleur est alors mieux contrôlée et moins ressentie. L’orthophoniste contrôle leur réalisation à la séance suivante car l’apprentissage du geste n’est pas toujours évident.
Les mains doivent toujours être lavées avant de réaliser la stimulation, que ce soit en externe comme en endo-buccal. Le globe oculaire ne doit jamais être touché.
En cas d’injection de toxine botulique, il peut être demandé au patient d’éviter les massages dans les jours suivants afin de limiter les risques de diffusion du produit.
Selon les professionnels, la pratique des stimulations manuelles diffère sur certains points, notamment au niveau du rythme et de la force impulsée dans les stimulations. Il est donc délicat de proposer une présentation consensuelle des massages. Nous avons choisi de recourir à des schémas pour tenter de montrer ce qui peut être proposé. L’orthophoniste a dans tous les cas la liberté de choisir ce qui convient le mieux pour le patient.
A noter que les massages seront plus difficilement appliqués par les patients eux-mêmes s’ils présentent des troubles cognitifs associés (problème évoqué dans le cas des syndromes alternes dans le Mémoire de Maëlle Maignan, 2018).
A. Les massages externes
Si les pratiques peuvent être différentes, plusieurs caractéristiques semblent malgré tout communes dans la procédure.
Les stimulations sont :
- Centripètes : du centre vers la périphérie.
- Dans le sens des fibres musculaires.
- Symétriques : envoyer les mêmes informations au cerveau pour les deux parties du visage.
- Analytiques : étage par étage (front – orbite – nez – joues – menton – cou).
- Sans élévations manuelles.
- Répétées au moins 3 à 5 fois.
- Avec une crème neutre et fluide (type Dexteryl) ou une huile pour favoriser le glissement des mains.
L’équipe de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière propose des vidéos illustratives des massages selon sa pratique :
Selon notre expérience et notre pratique, nous préférons n’étirer que les muscles spastiques, fortement en endo-buccal et en externe. En effet, les muscles spastiques brident les mouvements et lorsqu’ils sont étirés, ils deviennent plus souples. Par contre, à notre avis, les muscles flasques n’ont pas lieu d’être étirés puisqu’ils sont ptosés et ont besoin de gagner en tonicité et en contraction. En revanche, des tapotements et pincements peuvent permettre de stimuler le muscle pour le faire réagir.
B. Les massages endo-buccaux
Dans le cadre des massages internes, les stimulations seront plutôt :
- Dans le sens des fibres musculaires.
- En utilisant la pince : par exemple avec le pouce à l’intérieur de la joue et l’index (+majeur si besoin) à l’extérieur en contre-appui.
- Symétriques : envoyer les mêmes informations au cerveau pour les deux parties du visage.
- Répétées au moins 3 à 5 fois.
- Avec des gants(ou si le patient les réalise lui-même avec les mains bien propres).
Retrouvez la vidéo sur les massages internes proposée par l’équipe de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière selon sa pratique :
Nous restons réceptifs aux propositions ou points de vue différents des autres professionnels spécialisés afin de proposer une présentation ouverte à la discussion.
SOURCES
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- Gatignol, P., Lannadère, E., Lamas, G. (2008). Le toucher dans la rééducation des paralysies faciales périphériques. Rééducation orthophonique n°236, 99-112.
- Gatignol, P., Lannadère, E., Bernat, I., Tankéré, F., Lamas, G. (2011). Bénéfices de la rééducation d’une paralysie faciale périphérique. Revue Médicale Suisse 311(35), 1908–1913.
- Hebting, J.M. & Ferrand, G. (2015). Kinésithérapie de la face, du crâne et du cou. Issy-les-Moulineaux, France : Elsevier Masson.
- Kamina, P. (2002). Précis d’anatomie clinique (Tome II). Paris, France : Maloine.
- Lafosse, D. (2009). Prise en charge en kinésithérapie de la paralysie faciale périphérique non opérée. La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale, 318. 18-21.
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- Lamas, G. et P. Gatignol, Paralysies faciales. Paris, France : Solal.
- Lambert-Prou, MP. (2013). Manuel Orthophonique d’aNAlyse de la paraLYSIe FACIALe périphérique. Document inédit diffusé au centre de formation initiale de Caen.
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- Lannadère, E. Gatignol, P. (2011). Prise en charge des paralysies faciales périphériques. Les entretiens de Bichat 2011, 79-93.
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- http://www.moebius-france.org/index.php?p=nostrafon
- http://www.sircharlesbell.org/
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